Semaine du Handicap SEEPH – comment en parler sans tabou ?
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Comment en parler sans tabou ?
Afin de permettre à chacun d’avoir sa chance et de trouver sa place au sein de l’entreprise, les initiatives se multiplient pour sensibiliser l’ensemble des salariés à la diversité et au handicap.
Quel est l’ennemi n°1 d’un travailleur handicapé fraîchement embauché ? Le silence, conséquence de la gêne des collègues à son encontre. C’est pour trouver une solution à ce problème et pour casser les a priori sur le sujet que les entreprises sont de plus en plus nombreuses à rechercher la meilleure manière de sensibiliser le personnel. En tête d’affiche ? Les activités ou supports valorisant et montrant que les travailleurs issus de la diversité ou porteurs d’un handicap n’ont rien d’incapables. Elles se laissent donc tenter par le handisport, le théâtre, les jeux, les concours, les animations originales, les témoignages porteurs de sens, la réalisation de films…
Des interventions pertinentes
Au fil des années, les conférences originales, spectacles et animations théâtrales se sont imposés comme des valeurs sûres de la sensibilisation. «Les entreprises me contactent pour trouver des intervenants sur 4 sujets : le management, la culture, le handicap et la diversité. Au total, ce sont 1.000 personnes et plus de 2.700 thèmes différents. Le pôle handiversité représentant 419 thèmes tels que l’accueil d’un client aveugle, l’addiction, l’égalité des chances, le bonheur d’être handicapé, la diversité performance… », témoigne François POTIÉ LUSSIGNY fondateur du cabinet UNIQUE & DIFFERENT. En faisant appel aux services de sa société, une entreprise peut par exemple opter pour le thème «Dédramatiser le handicap» avec Miro (lire l’encadré « Miro, créateur et acteur du one-man-show «Bien vu Miro») ou « Tomber et se relever » avec Sylvain Augier («La carte au trésor», «Faut pas rêver»). «Mes intervenants vont du plus classique au plus décalé (décoiffant), du plus célèbre au plus inattendu».
Dans la pratique, les entreprises n’imposent généralement pas ces séances à leurs salariés. «Souvent, les conférences/animations ouvertes à l’ensemble du personnel se déroulent entre 12h et 14h». S’il insiste pour que la direction générale soit présente afin de montrer l’exemple, François Potié Lussigny regrette que ces initiatives ne soient pas encore entrées dans le management comme un élément fondamental et donc incluses dans les heures de travail. « Il y a toutefois quelques exceptions, à savoir les grosses sociétés d’origine américaine qui réunissent 300 managers entre 9h et 11h le matin ».
Une sensibilisation qui porte ses fruits puisqu’aujourd’hui le handicap est de moins en moins tabou sur le lieu de travail, ce qui n’est pas forcément le cas de la diversité. «Je pense qu’il y a encore une grande différence entre les managers, les personnes en charge des Missions Handicap qui sont sensibilisés, qui organisent ce genre d’interventions et l’ensemble du personnel pour lequel il y a encore beaucoup d’a priori et de méconnaissance».
Des retombées positives
Quel est le secret de ces animations originales ? Pourquoi sont-elles pertinentes ? Loin des discours officiels et ennuyeux, elles donnent au message un impact bien plus fort. «A vec mes intervenants sur le thème du handicap, nous ne faisons pas dans la pitié. Bien au contraire. Quand je travaille avec un pilote d’avion aveugle ou lors de projets avec Philippe Croizon, la personne qui vient de traverser la Manche, nous ne sommes pas dans le misérabilisme : nous faisons rêver les gens, nous donnons du sens. Or, l’entreprise a soif de sens ». Et d’ailleurs, les retours des événements sont rarement négatifs, la sensibilisation originale semble efficace comme le montre ce témoignage recueilli à l’issue du spectacle de Miro : « Au-delà du pur divertissement, cela m’a permis de prendre conscience d’une autre
réalité, celle des “non-voyants”/”malvoyants” sans que cela ne soit rébarbatif ou moralisateur. Ce type d’approche « positive » du monde du handicap a permis de capter toute mon attention sur le sujet (…) pourtant grave. Je suis, en conclusion, très satisfait de l’approche choisie pour parler des personnes handicapées ». Innover, simplifier et enthousiasmer sont les maîtres mots du cabinet UNIQUE & DIFFERENT.
Dédramatiser par le rire
L’humour, rien de tel pour détendre l’atmosphère. Miro l’a bien compris en créant son one man- show «Bien vu Miro» : une conférence spectacle interactive autobiographique, basée sur son expérience de malvoyant devenu aveugle. «Au début, par fierté, je ne voulais pas dire que j’avais un handicap visuel. Je fus alors confronté à d’incroyables péripéties, plus drôles les unes que les autres. Un jour, alors que je m’installais à table, je me suis assis sur quelqu’un !».À travers l’humour et le théâtre, «Bien vu Miro» permet un échange sans tabou. « Grâce à des anecdotes assez amusantes, je permets au public de réagir et je le sensibilise ainsi au problème du handicap. Concrètement, j’arrive sur scène avec mon chien-guide, puis je crie “Y a quelqu’un ? Y a quelqu’un ? C’est une entrée en matière destinée à les faire réagir”». De l’humour mais aussi de la pédagogie, un mélange audacieux qui interpelle. « Mon spectacle est instructif et drôle en même temps. L’objectif étant de dédramatiser à travers le rire. Je montre au public comment il faut se comporter vis-à-vis d’une personne aveugle, que ce soit pour la guider, payer à la caisse (reconnaître les billets, les pièces), trouver la cantine…Afin que, dans le monde de l’entreprise, la personne aveugle qu’elle soit cliente ou membre du personnel soit mieux perçue». Quant à la réaction du public, Miro avoue que les premières minutes font souvent place à une certaine gêne et une certaine passivité. «Mais, bien vite, les personnes interviennent spontanément, font des commentaires, elles sont très curieuses. Comme je leur dis, j’ai accepté mon handicap donc je peux répondre à tout type de question».
Selon Miro, c’est grâce à ces actions de sensibilisation que le sujet du handicap est de moins en moins tabou dans le monde de l’entreprise. « Les DRH ont moins de scrupules à recruter des personnes handicapée car les clichés s’estompent. Les gens ont par exemple souvent l’impression que les personnes aveugles sont un peu amoindries intellectuellement à cause de leur façon de bouger la tête. En participant à mon one-man-show, ils se rendent compte qu’il s’agit d’un cliché ». «Bien vu Miro», c’est finalement une manière originale mais surtout efficace de sensibiliser les entreprises au handicap. Et au-delà du handicap visuel, c’est la dédramatisation de l’ensemble des handicaps qui est visée.
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Extrait de
Diversité & Franchise
Emploi
Diversité & Handicap
Novembre 2010
Marie Guyader